Les îles Lavezzi
À l’extrême sud de la Corse, au large de Bonifacio, émerge dans l’eau transparente un massif de blocs de granit poli d’un gris clair. Ces géants aux formes douces composent avec l’eau turquoise un tableau magique que l’on compare souvent aux Seychelles. Les 23 îlots et récifs qui forment l’archipel des îles Lavezzi constituent incontestablement l’un des plus beaux sites de Corse, attirant quelque 250 000 visiteurs chaque année. Cap sur ce joyau de Corse-du-Sud qui se découvre par la mer.
Origine et histoire
Les Lavezzi font partie d’un ensemble géologique qui atteste du lien entre Corse et Sardaigne, sœurs Tyrrhénienne autrefois réunies. La séparation des îles avec le littoral corse est relativement récente puisqu’on estime que les hommes du paléolithique pouvaient parcourir à pied la dizaine de kilomètres qui séparent l’actuelle Bonifacio de l’archipel. La plus grande île et la seule habitée, Cavallo, domine les 4 îlots de Poraggia, Ratinu, Piana et Sperduto, ainsi que les récifs, dont celui de Lavezzu qui a donné son nom à l'ensemble.
L’histoire des Lavezzi épouse celle de la Corse : on y trouve des traces de peuplement qui remontent au néolithique et celui-ci se poursuit aux époques romaines et paléochrétiennes. Situé dans une passe maritime dangereuse, l’archipel fait cependant longtemps figure de piège pour les navigateurs. Au XIXème siècle, la frégate Sémillante se fracasse sur les récifs de l’archipel. Un phare y est construit quelques années plus tard. Sa silhouette rouge domine les Lavezzi, comme pour rappeler l’envers de ce paradis. Seule autre construction visible dans ces îles sauvages, la nécropole des naufragés de la Sémillante témoigne encore de la catastrophe qui sera narrée par Alphonse Daudet. Dans ce cimetière marin chargé d’émotion, gardé par les goélands, reposent les 750 âmes de l’équipage.
Avant l’essor du tourisme de masse en Corse, dans les années 1970, les Lavezzi appartenaient aux moutons et aux oiseaux. On peut encore apercevoir, au détour des sentiers, des bergeries en ruine qui témoignent de cette tradition pastorale. À partir des années 1980, l’île de Cavallo se privatise. Elle abrite actuellement un hôtel de luxe, seul hébergement des Lavezzi. Le reste de l’archipel devient un territoire protégé, au sein de la Réserve naturelle des Bouches de Bonifacio.
Une biodiversité unique et fragile
L’écosystème des Lavezzi présente une richesse inversement proportionnelle à leur taille. Dans ces micro-îles, immortelles odorantes et œnanthes fleurissent une verte pelouse marine. La faune avicole y a prospéré, jusqu’à développer des espèces endémiques comme le goéland d'Audouin ou le puffin cendré qui s’y reproduit. D’autres oiseaux y font escale durant leur migrations. Mais le tourisme se marie mal avec la préservation de la faune et les colonies d’oiseaux ont souffert des quelques 3000 estivants qui débarquaient quotidiennement dans l’archipel. En 2021, les autorités ont choisi de limiter l’accès à 5 km de sentiers, de manière à préserver la tranquillité de la faune et de la flore.
Si vous souhaitez profiter d’une journée idyllique dans ce paradis fragile, il vous faudra donc veiller à bien respecter les consignes données sur le bateau à l’aller. Il faut suivre les sentiers et ramasser les déchets. Vous pourrez vous baigner sur les plages et y pique-niquer, mais il est interdit de s’installer sur les rochers. Prévoyez également de quoi vous protéger du soleil si vous restez longtemps, car il n’y a pas d’ombre aux Lavezzi. Il ne vous reste qu’à vous laisser aller au plaisir des sens sur un banc de sable éblouissant, léché par une eau tiède et cristalline sous les silhouettes massives d’une ménagerie de pierre multimillénaire...
Le paradis des plongeurs
Pour découvrir les secrets de l’archipel, rien de tel que de pénétrer dans ses luxuriants fonds marins. Les îles Lavezzi font partie des meilleurs spots de plongée de Corse. Que vous soyez débutants ou confirmés, vous trouverez plusieurs centres qui proposent des excursions nautiques avec snorkeling ou plongée. Si vous aimez évoluer sous l’eau, l’archipel vous garantit un voyage inoubliable dans une explosion de couleurs et de formes, à la rencontre de poissons peu farouches. Certains ont même leur lieu dédié : le sec du Pellu, surnommé Mérouville, abrite une famille de mérous aussi imposants que sympathiques. On peut même les caresser si l’on s’y prend avec douceur ! Au cœur des éboulis et des tombants, virevoltent les sars, girelles, oblades et canthères. Vous pourrez aussi apercevoir des murènes, des dentis argentés, des daurades ou encore des thons.
Au sortir du rêve, sur le bateau du retour, vous jetterez un dernier regard sur cet univers édénique. Les frontières entre ciel et mer se dissolvent dans mille nuances de bleu et les oiseaux retrouvent leur royaume de granit…
